Travailler dans un écosystème responsable : une exigence pour le Numérique Responsable
Repenser son écosystème numérique est devenu indispensable
À l’ère du numérique omniprésent, chaque composant de notre infrastructure technologique, des lignes de code aux serveurs, contribue à une empreinte environnementale significative. Le concept d’écosystème responsable devient ainsi crucial, impliquant une réévaluation systémique de toutes les facettes de l’IT pour les aligner sur des principes durables.
Le Numérique Responsable repose sur la conviction que chaque acteur de la chaîne — développeur, architecte, DSI, CTO — a un rôle déterminant à jouer. Ce changement de paradigme, à la fois technique et culturel, est motivé par des données préoccupantes :
- Fabrication des équipements = 78 % de l’empreinte carbone du numérique : Cette donnée provient d’une analyse publiée par WeCount, qui explique que la majorité de l’impact environnemental du numérique provient de la phase de fabrication des équipements (ordinateurs, smartphones, serveurs, etc.) plutôt que de leur usage.
- Épuisement des ressources naturelles dû à l’extraction des métaux rares : Cette information est issue d’un rapport de l’ADEME relayé par le site du gouvernement français sur le numérique écoresponsable. L’étude met en lumière les impacts environnementaux liés à l’extraction de ressources pour la fabrication des appareils numériques.
- La gestion inadéquate des déchets électroniques a conduit à une augmentation de 82 % de ces déchets entre 2010 et 2022, atteignant 62 millions de tonnes en 2022, avec des conséquences graves sur l’environnement et la santé humaine.
Ces constats soulignent l’urgence d’adopter des pratiques plus responsables dans le secteur numérique, en repensant non seulement les technologies que nous utilisons, mais aussi la manière dont nous les concevons, les produisons et les éliminons.
Le matériel informatique, point de départ d’un écosystème responsable
Le choix du matériel est un levier trop souvent négligé. Pourtant, plus de 78 % de l’empreinte carbone d’un équipement informatique est liée à sa fabrication. Allonger la durée de vie des équipements, privilégier le reconditionné ou le matériel éco-conçu, adopter des politiques de maintenance proactive : voilà des stratégies à intégrer dès la définition de l’écosystème IT.
Cela implique aussi une approche plus fine des achats : choisir des fournisseurs engagés, capables de garantir une traçabilité des composants, et une politique de recyclage claire. Un écosystème responsable, c’est d’abord un matériel cohérent avec les valeurs que l’on souhaite incarner.
Des produits et services écoresponsables, conçus pour durer
Penser durabilité dès la conception
Penser un produit ou service numérique écoresponsable commence dès sa conception. Cela passe par une démarche d’éco-conception, qui vise à réduire les impacts environnementaux sur l’ensemble du cycle de vie, tout en maintenant les performances attendues. Cela implique notamment :
- La minimisation des ressources nécessaires.
- Favorisation de la sobriété fonctionnelle.
- De privilégier un hébergement responsable
- De concevoir des systèmes maintenables et durables.
L’objectif est clair : minimiser les ressources nécessaires à chaque étape du cycle de vie, de l’hébergement à l’usage final. Pour une introduction complète à l’éco-conception appliquée au numérique, vous pouvez consulter cet article de notre blog : Pourquoi l’éco-conception est-elle essentielle ?
Cette démarche est aujourd’hui structurée et encadrée par des référentiels, comme le Référentiel général d’écoconception de services numériques (RGESN).
API, SaaS, plateformes : repenser l’impact de l’offre
Auditer l’impact environnemental de vos solutions numériques est un levier essentiel pour agir efficacement. Cela passe par :
1- Mesurer la performance environnementale de vos sites, applications ou APIs via des outils spécialisés :
- EcoIndex : fournit un score environnemental basé sur la complexité du DOM, le poids et le nombre de requêtes.
- GreenIT Analysis : outil open source basé sur le référentiel du Collectif GreenIT.
- Website Carbon Calculator : calcule l’impact carbone d’une page web.
*Les outils d’audits automatisés ne prennent en compte que 20% voire 30% des référentiels (RGESN / RGAA / RAAM /RAPDF…) Cet audit est un indicateur mais ne remplace pas un audit manuel.
2- Identifier les sources de surconsommation :
- Backend trop sollicité ? Logs inutiles, traitements non optimisés ?
- API mal documentées, provoquant des appels excessifs ?
- UI trop gourmande en ressources (animations, frameworks surdimensionnés) ?
3- Éviter la dette fonctionnelle en limitant les fonctionnalités non utilisées ou rarement utiles, qui consomment malgré tout.
Ces outils permettent aux équipes techniques de piloter l’optimisation environnementale comme elles pilotent la dette technique ou la sécurité avec méthode et indicateurs.
Une communication numérique responsable, plus sobre et plus utile
Réduire l’empreinte des contenus diffusés
Un site vitrine de 500 Ko ou une vidéo autoplay de 30 Mo en page d’accueil : l’écart est colossal en matière d’impact environnemental. Chaque élément chargé consomme de l’énergie côté serveur, réseau, et utilisateur final. Pour une communication plus responsable, il est essentiel de :
- Optimiser les formats : privilégier les images compressées (WebP, AVIF), limiter les vidéos lourdes et proscrire l’autoplay.
- Réduire les trackers : limiter le recours à des scripts tiers (ex : analytics, pubs) qui multiplient les requêtes.
- Héberger localement : limiter le recours aux CDN si non essentiels et privilégier des hébergements écoresponsables.
- Alléger le contenu : éviter les carrousels ou effets inutiles, supprimer les redondances, alléger le code source.
Rendre la communication accessible à tous
Le respect des règles d’accessibilité numérique est un impératif réglementaire et éthique. En communication interne comme externe, cela implique :
- Des contrastes de couleurs suffisants entre texte et fond ;
- Des tailles de police lisibles et adaptables (responsive design) ;
- Une structuration logique des contenus (titres, listes, tableaux) pour la navigation clavier et lecteurs d’écran ;
- Des alternatives textuelles aux images et contenus audiovisuels.
Ces principes sont détaillés dans les référentiels comme le RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité).
Une communication inclusive va au-delà de la simple accessibilité. Elle cherche à favoriser l’usage par toutes et tous, quels que soient les profils (âge, handicap, niveau de littératie numérique, langue, etc.). En agissant à ces niveaux, on renforce à la fois l’impact social et l’efficacité globale de la communication numérique pour favoriser un écosystème responsable complet.
Éco-conception et accessibilité : deux leviers complémentaires pour renforcer son écosystème numérique
L’éco-conception et l’accessibilité numérique sont deux démarches complémentaires qui visent à créer des services numériques à la fois plus durables et plus inclusifs. L’éco-conception consiste à réduire l’impact environnemental dès la phase de conception, en optimisant la consommation énergétique, la sobriété des ressources et la durabilité des produits. Parallèlement, l’accessibilité garantit que ces services sont utilisables par tous, y compris les personnes en situation de handicap.
Ces deux approches partagent des objectifs communs : simplification des interfaces, optimisation des contenus, meilleure organisation de l’information et limitation des fonctionnalités superflues. Par exemple, un site sobre, léger et bien structuré est non seulement moins énergivore mais aussi plus facile à naviguer pour des utilisateurs avec des besoins spécifiques (déficience visuelle, motrice, cognitive).
Adopter une démarche conjointe permet d’optimiser les ressources tout en maximisant l’accessibilité, ce qui améliore l’expérience utilisateur globale. Cela nécessite d’intégrer dès le début du projet des critères d’éco-conception et d’accessibilité, et d’impliquer toutes les parties prenantes (designers, développeurs, utilisateurs) dans ce processus responsable.
Plusieurs retours d’expérience montrent qu’allier ces deux dimensions conduit à des produits numériques plus performants, durables, et équitables.